Le coup d’œil de Juliette…

14 novembre 2017

 

Ma vie de baroudeur me permet de côtoyer des Femmes et des Hommes exceptionnels mais ils sont rares, alors quand ça arrive, il faut les savourer. Via les liens sociaux une dame me contact pour sa fille de 16 ans qui voudrait me rencontrer, hélas le temps me manque, mais là, je ne sais pas encore pourquoi, ma petite voix a insisté pour que j’accepte. Et me voilà face à Juliette et sa « binôme » comme aime en plaisanter sa maman. Cette charmante adolescente est non voyante et atteinte d’autisme Asperger. Pour ceux qui ne connaissent pas ce syndrome, sachez que les noms qui vont suivre en font partie : Albert Einstein, Vincent Van Gogh, Wolfgang Amadeus Mozart, Alfred Hitchcock, Andy Warhol, Isaac Newton, Mickael Jackson, Mark Zuckerberg, Bill Gates, Léonard de Vinci… Sans le savoir j’allais faire une rencontre exceptionnelle. Toujours dans mille occupations en même temps l’heure du rendez-vous approche, je me dis qu’une fois de plus je vais rencontrer une gamine « différente », sans plus. Au bras de sa « binôme » elle monte doucement le chemin de terre vers ma minuscule cabane, de loin un sourire m’éclaire, Juliette débarque. Née sans yeux, elle vit, elle vibre, elle existe, d’une manière lumineuse. Bien plus que distinguer, elle sent, elle écoute et voir avec son cœur n’est pas donnée à tout le monde. Le but de sa visite est de m’interviewer pour le web-radio qu’elle anime. Assis dans ma cabane lapone, je la laisse mener le débat, entre deux questions pertinentes, elle m’explique ses « différences ». Le syndrome d’asperger ne m’est pas inconnu, la plus belle interview de ma vie m’a été donnée par une journaliste qui en était atteinte, très souvent je pense aux confidences que cette chroniqueuse avait su faire surgir de mon fond intérieur. Alors Juliette sort son enregistreur, ses questions sont simples comme est et doit être la vie, ici pas de paraître, juste être. Nous parlons à bâton rompu, de notre pauvre société, de l’égo, de la surconsommation. Du haut de ses 16 ans la sagesse infuse, Albert Camus, St Exupéry, Sénèque, Schopenhauer qui aurait pu nous dire : l’essentiel pour le bonheur de la vie, c’est ce que l’on a en soi-même.  Tous et bien d’autres se glissent dans ses mots, je suis sans voix je connais des êtres aux paraître impeccables qui ne pourraient pas tenir ne serait-ce qu’une minute cette conversation. Elle veut tout savoir de mes gouts alors je l’amène en Laponie, au Yukon, au Groenland, dans la poésie, la solitude, bien-sur, elle côtoie déjà beaucoup de langues, connaît les légendes des peuples boréaux, elle me confie ses désirs d’écriture en gardant tout de même ses secrets. Les contes qui finissent bien ne lui conviennent pas ou peu, alors elle déshabille Shahrazade pour lui offrir plus de cœur, plus de lumière, une vérité que vous ne pouvez voir, vous regardez avec vos yeux ! On échange des mots en grec, turc, espagnol, suédois, finlandais, le monde qu’elle n’a pas encore visité lui tient dans sa main. Le temps à ses côtés me semble un cadeau des Dieux. Toujours brut de décoffrage, je tente de gratter mais derrière tout ça il y a du béton avec un cœur sensible. Elle note mes mots, je retiens ses rires, elle m’interroge, je me remets en question. Ma cabane est un minuscule musée de mes expéditions polaires, alors, seule elle, a le droit de tout avoir en main, une griffe de phoque lui est discrètement glissée dans sa boîte à souvenirs. En gage de confiance je lui demande une promesse, celle de venir à mes côté découvrir le pays du Grand Nanoq. Elle a accepté, c’est chouette la vie, non !  Mais nous sommes insatiables, les mots nous rattrapent, ils sont là entre nous sans tabou. La philosophie revient, une pluie d’aphorisme nous inonde, les yeux, une jambe en moins, peu-importe nous sommes vivants et bien plus encore.                        
Il vous est indispensable d’aller visiter sa page Facebook Le coup d’oeil de Juliette, ainsi que son site internet Le coup d’œil de Juliette qui sont une source de vie loin du miroir aux alouettes qu’est notre quotidien.
En rencontrant Juliette, qui sort à peine de l’enfance, je me dis que l’avenir des Hommes n’est alors pas encore foutu.

Des Cols et des Ecoles cinquième édition

13 octobre 2017

La cinquième édition Bout de vie des rencontres Des Cols et des Ecoles, sous l’égide de la Fondation d’entreprise Française des Jeux, vient de se conclure en beauté. La salle de l’école primaire de Muratello était comble, les questions ont fusé, la vie est une alchimie, le malheur peut devenir force et énergie, les enfants ont tout pris, ils seront les adultes de demain…

Lundi nous sommes partis de Bastia, la première étape nous a mis devant une réalité digne de Lapalissade : la Corse est une montagne en plein milieu de la Méditerranée ! Les jambes ont brulé !  Oups ; suis-je bête, la jambe ! Etre unijambiste est une épreuve supplémentaire dans l’ascension d’un col, mais surtout ne confondez pas les mots : handicap et handicapé. Toute l’équipe est composée de cyclistes porteurs d’un handicap mais pas une seule fois nous avons refusé le « combat pacifique » du dénivelé, seuls les handicapés refusent la vie, nous on la croque. Si je devais vous offrir une image, la première qui me vient en tête est celle-ci. Alors que nous roulions en pleine montagne, les cantonniers en pleine action, (je vous assure ça existe), en fauchant les bas côtés, ont laissé sur plus d’un kilomètre une route recouverte de chardon sec, un vrai champ de mines pour nos pneus. Patrick notre samaritain, a instantanément chargé les vélos de ceux qui ne pédalent que sur une jambe, mais plutôt que de les voir se vautrer dans le fourgon ils ont enfourché leurs béquilles et pratiqué la borne à bonne cadence. Et dire que certains se plaignent pour une peccadille !..

 Nous voilà dans la cité de Pasquale Paoli, premier homme en 1755 à avoir rédigé les droits de l’homme, un sacré clin d’œil pour nous les « rabotés » que l’on essaye de mettre de côté sans cesse. La salle de la Faculté de Science est archi comble, des chaises supplémentaires sont coincées de-ci de-là, les plus en retard seront assis par terre, le thème du jour est : Création d’un projet. Sans aucun support audiovisuel ce fût un vrai régal de leur transmettre nos expériences. Bien après le coup de la fin du cours, les étudiants sont restés là à nous questionner. Un vrai bonheur…

Mais la montagne Corse nous a proposé quelques passages de catégories dignes des Alpes, le col de Sorba, le col de Verde, le col de la Vaccia, le col de Bavella, plus quelques bosses à vous couper les pattes, tout ça pour retrouver les scolaires de Zicavo, Conca, Muratello. Ils nous ont écoutés, ils nous ont questionnés. Oui les enfants ; la différence ne doit pas faire peur, elle doit être un vecteur de curiosité et non de rejet, nous sommes tous l’étranger de quelqu’un disait Sarthe. Mais comment oublier l’accueil des habitants de Levie, souriants, avenants, nous sommes venus l’espace d’un soir l’un de leurs citoyens. Les kilomètres se sont égrainés, les graines ont été semés, la vie est un potager on ne récolte que ce que l’on sème, très certainement des vocations vont s’inspirer de notre passage, qui sait.

Un grand merci à tous ces sourires croisés, un grand merci à la vie de nous avoir réunis. Un grand merci à toi Patrick, notre chauffeur, à toi Steve la force tranquille, à toi Jean-Luc le skieur de l’impossible, à toi Jérôme le charmeur du groupe qui ne lâche rien, à toi Alexis notre champion du monde mais bien plus que ça, à toi Karin la seule fille du groupe, à la Corse si belle sans la foule. Si cette aventure est une bouffée d’oxygène il nous faut remercier la Fondation d’entreprise la Française des Jeux qui finance en totalité depuis 5 ans ces rencontres, merci Dalila, merci Stéphanie…

Bientôt je vais reprendre la route pour aller rencontrer pendant 3 jours les jeunes de la région de Bulles en Suisse romande, à force de planter des graines peut-être une forêt de liberté verra le jour…

A pluche

Rencontres

14 juillet 2017

Des cols et des Ecoles dans les médias

13 octobre 2016

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Lien du JT Via Stella FR3 Corse de 20h d’hier soir à partir de la minute 18’45+-

 

 

Corte-Zicavo

7 octobre 2014
Le col de Sorba, d'une beauté suprême...

Le col de Sorba, d'une beauté suprême...

La petite pluie de la nuit a rendu la température idéale pour une journée de « haute » montagne. Le col de Sorba et de Verde nous attendent de pied ferme. Steve et Patrick ont la sagesse de ne pas tenter l’ascension de ces deux murs, la semaine est encore longue et une blessure pourrait tout gâcher. Le rythme est bon et chacun tente de trouver son bon rythme. Le premier dénivelé jusqu’au village de Venaco nous remet vite dans le bain, le cortège de véhicule de la nationale nous encourage ce qui est un élément de motivation supplémentaire. Au pied du col de Vizzavona nous bifurquons pour Sorba, l’amiral Festor et ses 100kilos de dynamite, tente l’impossible. Félix et Jérôme partent à leur allure, les Fran©ks moulinent. Mais le dénivelé devient « sauvage » et le mollet restant retourne en enfer. Franck sait se taire dans la souffrance mais dans la ligne des 12% ils décident de jeter l’éponge, on n’est pas là pour se blesser mais pour une série de partage et de fraternité. Le cabochard ne changera pas et je pars à la chasse de mes deux acolytes à deux épingles plus loin. Mon cardio est en mode « veille », ce n’est pas une pompe qui va m’empêcher de « m’amuser », non ? L’équipe de logistique me demande si je ne veux pas leur demander de m’attendre, à les sagouins, ils me piquent au vif et j’accélère ma « pédalerie », le Col de Sorba nous délivre de cette échappée sanglante. La descente jusqu’au village de Ghisoni est sublime à l’unanimité nous lui décernons la palme du plus beau col de Corse. Mais ne croyez pas que l’étape est finie, Bocca di Verde est juste là pour une finition de notre acide lactique. Jérôme nous impressionne, amputé fémoral il ne pédale que sur une jambe et les 9% pendant 5 kilomètres vont être durs, mais de la graine de grand champion sommeille en lui. Il gardera le sourire et à plus de 10km /h  gravira ce dernier obstacle avec une banane qui en dit long. Un petit « spuntinu » (casse-croute) et nous glissons vers Zicavo avec un beau 80 kilomètres au compteur. Les élèves nous attendent dans la cour où nous arrivons avec nos montures. Un établissement à l’ancienne qui en ferait rêver plus d’un, une seule classe pour les 8 niveaux des primaires de la vallée. Marion la directrice-institutrice n’a pas parlé de nos différences et les enfants auront la surprise de le découvrir par eux même. Un film débat est lancé et Jo Zef est de suite pris en otage par les élèves qui ont eu la délicatesse de nous préparer des gâteaux.

PS : La mascotte ne veut plus revenir avec nous !!!

Kusanaq

23 avril 2014
Au bout du monde...

Au bout du monde...

Kusanaq* C’est très beau*

Ilulissat : latitude 69°13’N   51°06’O  température -11° ; 300 km au nord du cercle polaire.                                  Le bimoteur Dash stoppe ses machines, je foule enfin le sol gelé du pays d’Apoutiak. Il est là en face de moi, une étreinte fraternelle nous unis enfin. On a des choses à se dire mais les mots manquent, on a toute la vie pour se les dire. Nicolas est doublement ému, mon arrivée est une sorte de  relais avec ses proches qui lui ont rendu visite et qui rentrent au pays des gens qui parlent fort. Le nomade ne doit pas se retourner, la trace, c’est devant qu’elle doit être faîte. Nous rejoignons notre camp de base qui est un groupement de containers savamment agencés en confortables chambres. Ce lieu est à disposition des travailleurs du cru ; pilotes d’avion côtoient, le reporter en transit, mécano partage la cuisine commune du guide polaire. Des pièces qui s’animent aux grés des récits quotidiens forts en adrénaline. Heureux comme un ours polaire reput en « barbaque » de phoque, j’écoute, j’apprécie mais surtout je ne dis rien, ici je suis touriste et quand on a ce statut la moindre des choses c’est pratiquer le silence. Niko me fait visiter le patelin, 5000 âmes y vivent à l’année, une vraie mégapole pour le Groenland qui ne compte que 56 000 habitants. L’économie locale est basée sur la pêche aux flétans et à la crevette, le tourisme pointe le bout de son nez et déjà quatre hôtels de haut standing y ont ouvert leur porte. Pourvu que les locaux puissent gérer ce gain si vicieux. Mais nous ne sommes pas là pour faire les touristes, il y a un défi à organiser, j’en connais là-bas au sud qui trépignent d’impatience. La mer est libre de glace, à pied nous nous rendons au lieu prévu pour le premier bain, les derniers jours ont apporté beaucoup de neige et l’accès à la « plage » qui n’est qu’une dalle de grés est blanche et glissante à souhait. Nous échangeons sur les points sécu qui seront la clé de la réussite de l’aventure, ici l’improvisation n’aura pas sa place, discipline, rigueur, et anticipation seront les mots clés de cette belle page qui va s’écrire. Mais l’aventurier à l’estomac au fond de la prothèse alors avec mon « frangin » nous dévalisons la superette pour nous préparer un plat de pâte à la crevette en guise de diner de gala. Les assiettes fumantes nous titillent les papilles, le calme dans la cuisine est scandinave, mais un invité surprise nous rend visite.

Salut les gars, je peux m’assoir avec vous ? Je m’appelle Francis.

-Tu veux un plat de pâte ?… -Non merci j’ai déjà mangé…

– T’as amené ta guitare au Groenland !!!

– Ouais je suis chanteur !!!

Improbable, incroyable surnaturelle Francis Lalanne … Un concert privé  rien que pour nous avec des confidences fraternelles, vous avez dit privilégié !!!

Un cabochard pris par les glaces

Un cabochard pris par les glaces

Si la vie de pêcheur est dure ici c'est un combat incessant...

Si la vie de pêcheur est dure ici c'est un combat incessant...

Le flétan qui sera transformé est envoyé vers le Danemark.

Le flétan qui sera transformé est envoyé vers le Danemark.

Une rencontre improbable...

Une rencontre improbable...

Entre vous et moi...

Entre vous et moi...

A vous de jouer l’aventurier!

31 mars 2014
Hiver 2008 expédition un Pied au sommet, des mécènes ont joué le jeu pour la réussite du projet. J'appelle cela le plan A

Hiver 2008 expédition un Pied au sommet, des mécènes ont joué le jeu pour la réussite du projet. J'appelle cela le plan A

L’hiver, qui pourtant n’a pas eu lieu, a permis à certain ours d’hiberner, je vous laisse le soin d’analyser si je faisais partie de ces si sympathiques plantigrades. 1500km en 4 jours ; un réveil en fanfare !  Coaching en entreprise, rencontre de mécène potentiel pour l’association, conférence, signature du livre et VIP (Vrai Invalide Promeneur) pour le Critérium International de cyclisme qui s’est déroulé en Corse du Sud. J’aime ces marathons de rencontre, une décharge d’adrénaline à base d’échange. Si quelques prénoms m’échappent, les sourires et les confidences de certains, qui m’ont énormément touché, resteront gravés à tout jamais dans ma « caboche ». Je vous rassure j’ai aussi, de temps à autres, droits à certains réfractaires qui ne loupent pas à me démontrer que ma croisade est inutile, ces petits pics me font un bien incroyable, à force d’entendre que Bout de vie et mes aventures sont extraordinaires, je pourrai avoir les chevilles qui enflent. Mais ce billet n’est pas un éloge à ma croisade mais une proposition, qui j’en suis sûr ne vous laissera pas insensible. En effet j’ai rencontré un probable mécène pour des stages de vie sauvage pour ceux qui malgré leur prothèse ne sont pas encore trop capable de marcher longtemps. (Voir le billet en cliquant ici). Cette institution serait prête à financer l’opération mais en contrepartie l’amputé invité devra s’investir dans ce projet. Cette semaine est une micro-expédition, qui devra recevoir le même égard que l’on porte pour chaque défi réalisé. Pour faire simple chaque participant devra trouver un sponsor pour avoir le sésame de venir dans « ma » vallée perdue. Je vous rassure ce n’est qu’un « jeu » que nous vous demandons. Le but sera de vous préparer physiquement de toute évidence mais aussi de démarcher autour de vous pour l’obtention de soutiens régionaux. Pour suivre ce stage une liste d’affaire personnelle vous sera demandée, sac à dos, chaussures de marche, textile adéquat… Ceci a un coût, à vous de rencontrer des partenaires pour cette aventure. Trop souvent des projets capotent car le plan A n’a pas fonctionné, un aventurier doit savoir « se vendre », j’en connais depuis longtemps les ficelles et cette démarche est très intéressante. De votre côté à vous de rencontrer vos élus, association de service (Lions, Rotary…), magasins, grande surface… Il vous faudra monter un dossier seul et prendre rendez-vous. Votre face à face devra être convaincant sans plonger dans le misérabilisme. En échange vous pouvez proposer une rencontre après votre retour avec les collaborateurs de vos « mécènes ». J’espère que j’ai été assez clair et bien sûr j’attends de pied ferme vos réflexions et suggestions. Je vais vous dire un secret ; pour que ce projet voit le jour soyez nombreux à réagir le mécène lit ce blog !!! (Salut les gones !!!)

Un souvenir ne s’achète pas il se vit.

La solitude mots par maux…

11 novembre 2012
La solitude m'a mené sur un chemin lumineux... La liberté

La solitude m'a mené sur un chemin lumineux... La liberté

« Y avait-il une réponse ? Une réponse à quoi ? Je n’étais pas en quête d’une pensée ni d’une philosophie ! J’étais en quête… D’un battement de cœur. » Satprem

Depuis la sortie de mon dernier livre je suis amené à répondre régulièrement  à cette question : Que vous apporte la solitude, en avez-vous peur, ne mène t’elle pas à la folie à moins que ce soit une philosophie de vie ?  Les poètes, les chanteurs la reprennent en boucle. A tellement la décortiquer certains philosophes en sont morts de démence, un sujet de philo pour le BAC ! Mais je vais tenter avec tact et sagesse d’apporter une réponse à cette question, avec mes images de références bien-entendu ! D’abord définir la solitude ; il y a celle qui est subie, destructrice, sans engagement, dénuée de communication ; puis la choisie, qui permet le rêve, la création, la réflexion, la contemplation. La première est terrible, un mal sociétal. On retrouve un homme mort dans son lit quinze ans après, personne ne s’était inquiété de son absence ! La deuxième, c’est celle que je  pratique, mais elle a plusieurs niveaux. Suivant la géographie, la vie sociale du moment elle peut prendre une intensité différente. Si j’ai choisi de vivre la solitude c’est que je la désire car elle me fait peur mais elle m’offre l’essentiel : la vie ! Découvrir ses peurs c’est les comprendre. Jusqu’à présent j’avais vécu la solitude en tant qu’intermittent ; rando en montagne de quelques jours, visite d’un pays en solo, plongée profonde sans binôme… Mais le Yukon comme je le raconte dans mon livre c’est mon Everest de  solitude. Le Vendée Globe, course à la voile, vient de prendre le large, trois mois de solitude extrême, pourtant pas un seul marin ne l’a vivra à l’identique.  Beaucoup de moines ou autres penseurs sont allés s’isoler dans des coins reculés pour comprendre le temps présent, le pourquoi de la vie. La solitude c’est avant tout une sensation, un ressenti. Sur ce grand fleuve j’étais seul sur des centaines de kilomètres, je ne devais et ne pouvais compter que sur moi-même. Le vide qui s’offrait à moi ne pouvait être comblé par une présence, la sécurité je ne pouvais la trouver qu’au fond de moi, « l’autre » ne pouvait s’y substituer, je devenais l’explorateur d’un « moi » inconnu. Bien-sur grande différence immense, je sentais l’amour des personnes laissées de l’autre côté du globe, la distance géographique ne comptait pas pour mon âme toujours en compagnie des êtres aimés.  Le soir je pointais sur une carte de l’Amérique du Nord ma position, je me surprenais à blêmir quand je visualisais ma position précise, près de rien, loin de tout… Il m’aura fallu des semaines pour comprendre qu’elle était constructive, après mes journées de pagaie et  mes taches finies, je n’avais personne à qui parler, personne à écouter, pas de radio car trop loin, pas de musique, j’avais oublié de charger des chansons sur mon MP3 ! La machine à cogiter se mettait en marche, vous allez me dire pas besoin de ça pour méditer. Détrompez vous, ici en Corse je connais assez bien la montagne pour pouvoir m’isoler mais en mon fond intérieur je ne me sens pas seul, au pire, en une journée de marche, je sais que je trouverai un village ; la vibration n’est plus la même. Ce n’est plus une vraie solitude, je ne compte pas combien de fois j’ai traversé avec mon Cabochard entre la Corse et le continent, mais la sensation et l’émotion  sont différentes. Se trouver en situation de non retour exerce un sixième sens qui transforme cette solitude en compagne, en professeur. Comme je n’étais plus en contact avec l’extérieur, certaines évidences devenaient plus floues, et certains doutes disparaissaient ; une sorte d’équilibre. L’essentiel avait une autre saveur. Certain jour sans vent le silence était d’une profondeur telle  que je le vivais comme une découverte, juste le son du cœur qui bat chamade. Un soir je me surprenais à entendre le froncement de mes yeux qui clignaient. Les autres sont loin, on se retrouve dans une vitrine, la foule, le stress, le temps qui passe cela ne nous touche plus. Le travail commence enfin, les histoires anciennes surgissent, elles ne semblent plus si importantes, les coups bas de la vie sont plus faciles à accepter, la vie si compliquée par moment semble simple car basique. La solitude est une sorte de savon, on se récure avec, on se sent propre quand on la vit. Être maître de son destin. Elle opprime le corps qui n’est plus qu’un pauvre support, le plexus semble écrasé, la gorge est sèche et puis c’est l’explosion enfin on comprend, enfin ; l’homme libre surgit, ne plus se préoccuper de son moi puisque nous sommes universel. Je pense que chacun peut y trouver une force incroyable mais elle éprouvante. Dans une époque de crise grandissante une des industries qui ne souffrent pas est celle de la communication. Quand j’observe quelqu’un qui est  seul, la première chose qu’il fait c’est contrôler son Iphone pour vite se connecter avec quelqu’un, mais ce n’est que du virtuel. La solitude est un miroir qui nous renvoie ce que l’on fuit. Aimer et savourer la solitude ce n’est pas fuir les autres bien au contraire, en se découvrant on comprend mieux le Monde. Mais attention  comprendre c’est aussi découvrir ce que vous n’aviez pas perçu avant et le bâton peut rebondir sévèrement au visage. La solitude m’a grandi mais elle m’a rendu encore plus exigeant car elle ne pardonne pas. La solitude m’a donné une montre ! Oui je sais maintenant que je ne suis pas immortel, quoi que l’on fasse l’aiguille avance et l’idée ne me fait plus peur. S’assoir sans rien faire est la plus belle chose qu’elle m’a apprise, combien de soir blotti près d’un grand feu ; j’ai été contemplatif… La rivière, la forêt à perte de vue, le chemin de ma vie certainement…

Vous n’êtes pas prisonniers de vos corps, ni confinés dans vos maisons ou dans vos champs. L’essence de votre être demeure au-dessus des montagnes et vagabonde avec le vent.Ce n’est pas une chose qui rampe vers le soleil pour se chauffer, ou creuse des trous dans la terre pour se protéger.  Mais une chose libre, un esprit qui enveloppe la terre et se déplace dans l’éther.

Khalil Gibran

A pluche !

Ciao Italia…

18 septembre 2012
Oratorio della Santissima Trinita di Momo.

Oratorio della Santissima Trinita di Momo.

En passant plus de deux mois en Scandinavie j’avais baptisé cette contrée : Le pays du silence. Depuis hier je suis arrivée en Italie, l’absolu contraire ! Le soleil chaque matin reste un peu plus dans ses pénates et comme je ne veux absolument pas pédaler de nuit moi aussi je flemmarde. Domodossola au petit jour est très active, la circulation est dense et je dois rester vigilant. La route « nazionale » n’a pas de piste cyclable et je me contente de mon tiers droit de route. La proximité de la Suisse doit déteindre sur ces automobilistes, ils sont respectueux et me laissent de la marge. Le faux plat descendant m’encourage, les courbatures d’hier sont minimes et je me surprends à rouler à 25km/h de moyenne. Je ne m’emballe pas la journée est longue, mais c’est toujours bon à prendre. Je roule plein sud sans détour, ça c’est bon pour le moral. Des bosses me freinent un peu mais je suis aspiré par la Méditerranée plus très loin. Je choisis de passer par le lac Orta, la route devrait être moins fréquentée. La rivière de cette étendue d’eau file dans le sens inverse de ma route, je sens de belles côtes ! Effectivement pendant 7 bornes je grimpe à 9km/h, mais le moral est au beau fixe, je rejoins ce magnifique lieu qui à la même géographie que celle de Neuchâtel, la route sera la même, bosselée ! Trois cotes me coupent les jambes, jeux de mots faciles, mais je m’y attendais un peu. A la différence des scandinaves assez discrets, les cyclistes italiens sont très joviaux avec moi, à chaque rencontre, j’ai droit à des encouragements. Je garde tout de même une super moyenne, qui me surprend, j’ai peur du contrecoup ! A la fin du lac, la dernière bosse n’en finit plus, un peloton, m’encourage comme jamais je ne l’ai été depuis le départ, je suis touché par tant d’égard. Ma carte semble me présager une longue plaine le long d’une rivière qui file sud, je devrais avoir un faux plat descendant pour 150km. Je croise le moignon, la prédiction s’avère exacte. C’est incroyable sans forcer je fonce sud, sud à l’infini, je suis aux anges, pourvu que ça dur. Je suis euphorique, je double quelques vététistes qui restent pantois, je les salue mais reprends ma « pédalerie », je me suis fixé la ville de Novara. Au bout de 4h effective de route, je fais mon break déjeuné. Un oratoire du XI siècle est encore en très bonne conservation, je me trouve un coin tranquille pour me restaurer en admirant l’édifice. Son nom m’est familier : St Trinité, comme celui de Bonifacio… A deux pas un bar, je ne résiste pas et m’accorde un vrai café italien ristretto. Il est 13h et un collège, fait ralentir le flux routier, les jeunes élèves comme les cyclistes ne sont pas indifférents à mon bout de vie. L’un d’eux, certainement un meneur, les encourage à applaudir !!! Je les salue tous d’une main. « C’est qu’avec leur truc, je vais être ému, mouhaaa!!! » Finalement avec une moyenne de 19,97km/h, soyons précis, je rentre dans la grande ville de Novara, pour afficher, un petit 96km en un temps record… A vol d’oiseau je ne suis plus qu’a 277km du cap Corse et à 3044km de Mehamn en Norvège, je peux vous assurer que ce type d’information fait du bien au moral.

PS : Gros problème avec les mascottes ! En Suède en demandant du « kaka » on obtenait du gâteau, ici en Italie en voulant un gatto ils ont un chat !!! Habitants de la Tour de Babel, ils deviennent fous ???

A pluche !

En Suisse…

9 septembre 2012
Je me rafraichis dans une fontaine d'eau glacée, la fontaine de jouvence!!!

Je me rafraichis dans une fontaine d'eau glacée, la fontaine de jouvence!!!

Je ne sais pas pourquoi mais depuis hier soir le moral est descendu en chute libre, ce matin au réveil j’avais envie de partir en vélo comme d’aller me faire guillotiner. Je me remue les méninges, me raisonne. Je lis déjà vos commentaires ! Finalement j’enfourche mon deux roues et repars plein sud. Adieu les pistes cyclables nauséabondes, adieu le stress de se perdre avec du kilomètre en plus pour rien. J’ai bien calé mon GPS point par point pour rejoindre la nationale helvète qui me conduira vers Soleure. Je sais que j’ai du gros dénivelé au programme ce sera un test pour les Alpes. La première heure me demande une grosse concentration pour respecter mon fléchage électronique. Chaque carrefour est enregistré et en ce dimanche matin je suis assez heureux de constater que je contourne la grande ville grise et blafarde sans le moindre problème. Au fil des heures je comprends ma baisse de régime, le physique est à un bon niveau, le vélo est sans le moindre souci mais cette épreuve allemande m’a pompé une énergie incroyable. L’effort ne me fait pas peur mais il faut que j’évolue dans un cadre qui me convienne. Les routes que j’ai empruntées depuis Lubeck m’ont fait traversée des régions avec un taux de pollution que j’ignorais, si je devrais les qualifier je dirais la traversée des produits chimiques. La nature est mon moteur, la fourmilière des hommes polluante me fait fondre comme névé au soleil. Je prends des petites routes qui deviennent sympa, petit village de montagne avec le sifflet des marmottes et le son des cloches de mes copines les vaches. Le dénivelé n’attend pas pour me rendre visite. Je ne suis pas pressé et prend ma cadence, je suis à 6km/h ! Normalement quand c’est dur physiquement le moral devrait suivre. Là c’est le contraire, je peine à monter mais je sens l’énergie de la montagne me requinquer. La moyenne baisse aussi vite que mon moral remonte, je transpire à grosse goutte. Je vide ma bouteille d’eau de réserve ainsi que la plus grande partie d’eau chaude du thermos, 2litres en moins ! En quatre heures je franchis 3 cols, je me fais un break à l’ombre, la température est estivale, 27°. Une grande descente m’amène sur la nationale, je sais qu’il y aura une piste cyclable sur sa bordure. Ce n’est plus une descente c’est une épreuve de luge, j’enchaîne les virages les uns après les autres à plus de 55km/h. Puis au fond de la vallée la route reprend du dénivelé, je me résigne, je mouline en appréciant le paysage. Encore un col en perspective, je sens que quelqu’un se met dans ma roue, tiens je ne serai pas seul à transpirer. Sur un coin de dégagement je m’arrête à la demande de mon poursuivant. Joseph, je n’ai pas fait exprès, sur un beau vélo de route veut savoir d’où je viens. Je lui raconte mon périple, mais il me demande des détails. Il ne parle que la langue alémanique et avec un peu de mal nous partageons un bout de vie. Un détail, il a 96 ans et roule tous les jours de l’année. Nous reprenons la route et au moment de partir il me serre la main avec des larmes aux yeux. Je suis sous le charme de ce vieil homme, je ne connais pas son passé mais à mon humble avis ma « différence » a dû lui souvenir un bout de sa vie. Je le vois partir comme une fusée et moi avec mon poids-lourd je peine en souriant.
Finalement je passe le dernier col de la journée et file en roue libre vers Soleure. 92 km au compteur avec un moral au beau fixe mais une grosse fatigue que la nuit va estomper.
A pluche !