Depeche Agence France Presse de ce matin…

17 septembre 2010

Le livre de l’aventure: Ayeltgnu, le défi d’une vie debout…

La Yukon River en kayak sur une jambe: l’aventure avec un grand « A »

dépêche de Patrick Filleux:

PARIS — « Ne va pas plus loin… Ils sont affamés… Ils vont te bouffer… »: les ours blancs remontent le cours de la Yukon River en Alaska. Frank Bruno, unijambiste est seul sur son kayak. Sans arme. C’est son défi. Il écoute les conseils de Dylan, un colosse chevelu, icône du personnage « d’un vol au-dessus d’un nid de coucou ».

Amputé d’une jambe, Frank Bruno, animateur et créateur de l’association « Bout de vie », s’était lancé ce nouveau défi en tentant de descendre en kayak, seul et sans assistance, les 3.100 km de la Yukon River, entre le Canada et la mer de Béring en Alaska.

Bruno, 45 ans, figure charismatique du monde du handicap, ne compte plus ses performances sur terre et mer, à pied, à ski, à la rame, du Groenland à la Géorgie du Sud, des fonds marins corses à la banquise du pôle nord ou sur les sommets de la cordillère des Andes… sur une jambe.

Mais son infortune, survenue lorsqu’il avait 18 ans, militaire sur le porte-avions Foch au large du Liban en guerre en 1983, homme de pont dont la jambe droite fut écrasée sous le train d’atterrissage d’un chasseur Crusader, est devenue un sacerdoce.

« J’ai cru que ma vie était foutue, dit-il. Le mot espoir était sorti de mon vocabulaire. Mais c’est lorsque que j’ai cessé de ne penser qu’à ma petite personne, que j’ai réalisé que j’avais des centaines de compagnons handicapés comme moi, amputés d’un bras, d’une jambe et qui eux aussi avaient perdu espoir, que j’ai créé +Bout de Vie+ ».

« Je n’ai jamais recherché l’exploit personnel qui n’a pas de sens, mais à travers mes aventures, je veux démontrer à tous ceux qui ont perdu le goût de la vie avec un ou deux membres en moins, que nous sommes comme les autres bien portant, que nous ne sommes pas diminués même si nous devons en faire plus que les autres à force de volonté et de rage de vivre ».

« Mon message, résume-t-il, c’est +Si vous voulez, vous pouvez. N’écoutez pas ceux qui vous disent que tout est foutu. Eteignez la télé, bougez…+ ».

« Les coyotes sont à l’affut. Les ours en quête de proies tournent autour du kayak. Les saumons remontent le cours de la Yukon. J’ai peur. Je parle avec la rivière. Elle est ma seule amie. Je suis seul avec moi-même. Je rame, je rame. Je pense à ces chercheurs d’or de la Yukon River de la fin du 19e siècle.

« Mais, j’ai peur… j’accoste ».

Et Frank de poursuivre: « j’installe mon campement sur la berge et un enfant paraît. Ne restez pas ici Monsieur. C’est dangereux. Venez voir mon papa… »

« J’avais remarqué, dit Frank, plusieurs mecs à la mine patibulaire, armés, tournant autour de ma tente et visiblement avinés ».

Et l’enfant conduit Frank chez son papa, Dylan (un colosse de 2 mètres, contrairement à l’original dont le talent donna le nom à l’hôte de Frank). « Des cheveux tombant sur les épaules, une carrure de boxeur et un regard de la plus grande humanité ».

« Tu dois arrêter ici, m’a-t-il dit. Veux-tu la mort ? C’est elle qui te guette. Tu as fait 2.500 km sur cette rivière de furie. Tu as suivi courageusement les recommandations des esprits. C’est ton honneur et celui de celles et ceux pour qui tu combats. »

Le petit garçon en question

Le petit garçon en question