Faire le deuil!

18 janvier 2016 par Frank Laisser une réponse »

IMG_7179web

Dans le documentaire Frères de sport je finis le film par une réflexion qui vous a fait énormément réagir.  On ne peut faire le deuil de l’accident ! Beaucoup d’entrevous avez commenté, vous avez acquiescé à cette sortie sincère et sans tabou, j’ai tenté à chaque lettre de répondre au plus juste avec « mes » réponses, issu d’une expérience très personnelle, alors par ce billet je vais tenter de le développer, tout en allant à l’essentiel, une confidence pour vous tous, un peu pour moi aussi très certainement.

Le deuil quelque qu’il soit, est une épreuve de vie, personne ne peut y échapper, mais la soupe est difficile à avaler, encore plus à digérer. Les phases se succèdent plus ou moins dans le même protocole, mais la finalité est difficile à atteindre. Le choc, le refus, la colère, la tristesse, la résignation, l’acceptation et la reconstruction sont à mes yeux les multiples phases du coup dur qui traversent nos existences.  Le choc est éphémère, même si chaque seconde semble un siècle, l’immense coup de massue se métamorphose assez rapidement en refus total. Pas à moi, non ce n’est pas possible. Puis la colère nous prend en otage, on la masque par des calmants, des thérapies, des réunions philosophiques, même parfois la religion, pour ma part j’ai choisi la fuite, concrétisée par un voyage de plusieurs années. La mer pour ôter l’amer ! La tristesse prend de la place, elle s’installe confortablement, elle aime bien se glisser dans les nuits noires hivernales, alors elles salent nos joues, nos âmes, nos espoirs sont noyés sous une tonne de sel, mais le petit jour nous délivre jusqu’à la prochaine nuit. Alors le temps érode, corrode et on se résigne, on croit accepter, on pense devenir sage, mais sur une ruine on ne peut construire une nouvelle vie sainement ! La restauration d’une vieille maison est remplie de surprise. On gratte, on déblaie et on trouve une pièce oubliée remplie de poussière, de vieux manuscrits qui nous offrent des chapitres qui racontent, nos vies sous un autre angle. On époussette, et les yeux piquent de nouveau, on lit, on relit on décrypte, les mots sont des restes de maux, on doit panser, mais aussi penser, mais qu’il est difficile de cautériser ces plaies. Alors on prend du recul on essaie de voir de quoi se composent les restes, on pousse quelques briques, on établit un nouveau plan. Les passants passent, quoi de plus normal, nous on reste, à moins que ce soit le contraire ! Puis un jour pour certains, pour les plus sages, les plus grands, les plus sensibles, de la ruine, surgit une cabane qui nous rassure, qui nous surprend et même si quelques larmes s’invitent sous son toit, on apprend à vivre sans « toi », notre si beau passé…

Votre avis m’intéresse, nous intéresse, une bâtisse ne peut se construire seule !

13 commentaires

  1. kiki dit :

    super l’explication sur le deuil de notre guibole Frank ,tu écris très bien , bises a toi et j’espère pouvoir aller en corse bientôt pour découvrir cette belle région

  2. Marie de Voujeaucourt dit :

    Aujourd’hui une lettre est parte en direction de la Corse pour toi Frank … No comment … Mais ce que tu dis dans ton billet me « salent » les joues … Tu comprendras en lisant mes mots 😉
    Tu es vraiment un grand homme … Ouahhh …
    Merci pour tes mots qui apaisent mes maux 😉
    Beijinhos (bisous en portugais) <3

  3. Marie de Voujeaucourt dit :

    Au fait … Pas mal la photo … Bea gars 😉
    Karin … Attention … Je rigole … Hi, hi, hi

  4. carole mongui dit :

    completement d accord avec toi, j ai l impression que tu as lu dans ma tete bises

  5. Bruno GENAY dit :

    D’accord copain …. entièrement d’accord …. pour ce qui est d’un bout, d’une partie de nous.
    Mais comment faire quand c’est une vie dont on vous a privé …… quand c’est une absence impalpable et invisible qui a modifié le cours de votre vie ????
    Ma guerre continue ….. l’acceptation c’est du « faux semblant »…. pour quand les autres me regardent …. pour continuer ….

  6. Patrick Chiappalone dit :

    Faire son deuil
    Chaque être humain est unique et donc il y aura autant de façon de faire son deuil qu’il y a d’être touchés. Chacun ressent de manière différente les mille et un maux d’une vie d’amputé. Une première grande différence dans l’acceptation c’est l’âge auquel l’amputation est arrivée. Plus on est jeune plus il est facile de l’accepter et faire son deuil. Biensûr inversement plus on est âgé plus s’est difficile. Le fait d’être un homme est aussi un avantage car pour une femme s’est encore plus dur. Perso j’ai été amputé à l’âge de douze ans en pleine innocence d’une enfance tranquille. C’était un accident bête, comme le sont tous les accidents. une seconde d’inattention et une vie changent à jamais. Ensuite il est vrai que ce fut un peu difficile pendant quelques mois et même quelques années, mais là vient une deuxième chose très très importante, le mental et la confiance en soi. Là, comment expliquer, tout est question de ressenti de force mental et moral. c’est là qu’intervient une troisième chose tout aussi importante, l’entourage avec le soutien et la force qu’il vous apporte. J’ai fait assez vite mon deuil de mon amputation car, arrive le quatrième point ,l’acceptation. Oui, accepter c’est avancer, accepter sa condition c’est continuer à vivre une vie normale. Plus vite on accepte, plus vite on avance de nouveau même s’il est vrai qu’on n’oublie pas, et pour cause on vit avec. Tous les matins quand on se lève, avant de mettre ses chaussures on met son bout de jambe ou de bras, son Boutdevie ( petit clin d’oeil). Il nous manque un petit bout, et alors, est-ce vraiment un souci. Combien de gens vivent dans une situation au combien plus compliquée que la nôtre, pas besoin de citer un million d’exemples, nous savons tout ça. C’est souvent notre égoïsme qui fait que nous n’avançons pas, oui notre égoïsme nous place au centre de tout, le nombril du monde. C’est là qu’il faut se remettre en question ne plus se sentir unique et ne plus se mentir. On est en vie et la vie est courte. Se morfondre ça ne sert à rien car de toute façon ça ne repoussera pas. Donc la seule et véritable chose à savoir c’est avancer droit devant. À partir de là on fait son deuil. Surtout il faut arrêter de se mettre des barrières, arrêter de penser que certaines choses nous seraient impossible à réaliser. Arrêter de douter de ses capacités car il n’y a rien de pire de se sentir faible et incapable de faire. Toujours essayer, et encore essayer, jamais douter. Je ne dis pas de réaliser des défis insensés comme le fait Frank. Pour certain le défit peu passer par de simples choses, aller à la plage en short comme si rien n’était et se foutre royalement du regard des autres, un défi c’est aussi de prendre un vélo et faire quelques Km, ect ect…..Un défi c’est tout simplement vivre le plus normalement possible. Le défit c’est d’oublier que l’on vit avec une prothèse. Notre prothèse fait partie désormais de nous, elle remplace le bout perdu. C’est comme ça, c’est la vie et on a la chance d’être là pour en parler. Faire son deuil s’est déjà comprendre ce qui nous bloque. Pour la plupart des gens, le blocage c’est la peur du regard des autres, la honte d’être meurtri et se sentir inutile, se sentir comme un animal de cirque. Quand la personne comprend que le regard des autres n’est pas un souci, que le regard des autres on s’en balance, là on fait son deuil. Faire son deuil c’est dans sa tête et on a beau avoir le soutien de tout le monde, personne ne fera son deuil si dans sa tête il ne s’accepte pas lui-même.

  7. Dolfinu dit :

    Le commentaire de Patrick résume tout, je suis entièrement d’accord avec sa façon d’aborder le sujet du deuil. L’accident est une chose imprévisible et la reconstruction nous appartient. Ca ne sert à rien de se lamenter toute sa vie sur les causes, les responsabilités et le pourquoi moi si ce n’est pour dépenser de l’énergie inutile. Nous sommes tous regardés un jour ou l’autre soit pour la beauté, la façon de se vêtir, la différence et rien n’empêchera l’homme de juger alors à quoi bon s’en offusquer.
    Il y a une vie avant l’accident elle a été plus ou moins belle, et il y a une vie après l’accident et nous devons la vivre sans faire référence au passé car nous vivons au présent. Avec des bouts en moins la vie n’est pas un long fleuve tranquille ma

  8. Dolfinu dit :

    mais elle ne l’est pour personne. On ne saura jamais ce que l’on aurait fait sans l’accident mais à nous d’agir au mieux avec la différence pour nous et ceux qui nous entourent….

  9. Mayspe dit :

    Chaque seconde de notre vie nous rappel combien nous devons être présent, dans notre vie et celles des autres, que l’absence d’un être cher ou la perte d’un membre qui nous feras boiter, ou prendre la vie à bras le corps même, si nos bras ne sont plus que des souvenirs, la vie nous donne cette chance de nous réaliser, avec amertume certes, mais regardez vous, comme vous êtes beau, regardez votre âmes comme elles enchantes les personnes qui sont en quêtes d’un renouveau, tous le monde cherche une béquille sur qui s’appuyer les gens s’appuient sur vous qui avaient eu la « chance » de rebondir vous êtes des exemples, et non pas des conseillés.
    Vous êtes la vie même, mais peut être ne le savaient vous pas, c’est peut être pour cela que la vie vous a épargner, d’un confort, sans remous, sans lendemain, sans piment, vous êtes des « guerriers de la lumières » et votre quêtes et d’être exemplaires, et vous l’êtes.
    Merci d’exister.
    Bien à vous

  10. Thomas dit :

    Il existe une dimension supplémentaire, la valeur de l’exemple lorsque l’on devient un homme non pas public mais visible, porteur de messages parfois malgré soi, porteur de sens et pas forcement d’espoir non plus. Comme disait Mr Albert Jacquard, la philosophie de l’humanitude vient prendre tout son sens dans ces évenements et dans ce que représente Frank. Alors respect sans complaisance.

  11. Aline dit :

    Faire son deuil, accepter : oui. Mais il me paraît fondamental, pour pouvoir accomplir ce processus long et difficile, d’accepter la douleur, de la regarder en face. Sinon elle reste tapie au fond de nous et agit à notre place. Nous perdons alors notre libre arbitre. Il faut aussi, je crois, essayer de voir ce que l’accident ravive dans notre histoire de vie. Je pense que bien souvent un accident n’arrive pas par hasard. Il intervient souvent dans une histoire de vie déjà blessée…Accepter son accident, accepter son bout de patte ou de bras perdu, est-ce que ça ne va pas de pair avec s’accepter soi-même ? Alors il faut y aller, accepter de creuser tout au bout de soi… Pour ma part, je pense qu’il est possible de faire le deuil d’un accident, mais personne n’est égal face à cela. Certains vont développer un syndrôme de stress post-traumatique, d’autres non..Le processus de deuil nous fait grandir, nous ouvre aux autres. Cela n’a rien à voir avec l’apitoiement sur soi-même qui sert souvent à ne pas se poser les bonnes questions…. Quelques années après mon accident, une amie m’a dit : « tu te sers de ta jambe comme une béquille » Ca m’a profondément choquée, et une fois le choc passé, j’ai compris qu’elle avait raison. J’ai compris qu’il fallait que j’avance et que je fasse un travail sur moi-même. Aujourd’hui, je vais bien, j’ai beaucoup grandi et je peux même dire que mon accident m’a « sauvée » en m’obligeant à avancer….Pour moi, le handicap est avant tout dans la tête.Et merci infiniment à Frank, à Bout de Vie, qui m’a refichu un coup de pied pour m’aider à continuer le chemin. Je conseillerais à tous de lire les bouquins de Boris Cyrulnik sur la résilience, capacité à dépasser des traumatismes. Salut et courage à tous.Aline

  12. Marie de Voujeaucourt dit :

    Aujourd’hui j’ai eu du courrier de Corse 😉
    Merci la vie, merci cher Frank … Touchée par tes quelques qui vont toujours à l’essentiel …
    Bisous tendres à toi, à Karin, à Jo Zef … Et bien sûr un petit clin d’œil affectueux à ton frère d’océan Bixente ( merci pour la photo …) vous êtes de chics types … Et vos rires résonnent encore dans ma tête … Reportage gravé à jamais dans mon <3
    Salute Freeman au grand cœur 😉

  13. Isabel la Vie dit :

    La phase du deuil (quel que soit le deuil que la Vie nous impose) est parfois un tremplin pour une re-naissance … Souvent je dis, « On nait à deux et on deviens seul ce que l’on est » … mais pour devenir ce que l’on veut être, il faut être présent dans sa Vie au quotidien, l’aimer, la chérir, la bichonner, l’écouter, aimer ce que la Vie nous offre et prendre conscience que les autres sont aussi « moi » …. c’est toujours un énorme plaisir de suivre ton parcours Franck, de te lire…. Je suis sûre que la Vie te donnes autant de plaisir que tu lui donnes …Il faut donner à la Vie l’en Vie de donner « en Vie » … Respect à toi et à tous ceux qui t’accompagnent dans cette aventure qui se renouvelle tous les 365 jours !
    « Merci la Vie » ! Isabel

Laisser un commentaire