Aluu, nous revoilou,
Le kayak prêté par l’agence 66°Nord a repris sa place pour l’hiver, un grand merci à Ben et Quentin pour leur confiance. Comme convenu, nous devions lui donner un nom. Ce sera Malik, qui veut dire la vague. Son comportement dans le vent nous a agréablement surpris, il mérite bien ce patronyme. Partis chacun sur son embarcation, nous sommes revenus avec Immaqa monté pour l’occasion en double. La glace nous a demandé beaucoup d’attention et le froid nous a accompagné jusqu’au bout. L’été est parti, la température est basse et si le vent se met dans le nez, le corps se retrouve congelé. Karin et moi-même, ce matin, avons dégustés. La brise de nord-ouest nous a donné encore une leçon polaire. Ma belle allemande ne disait rien mais ses silences en disaient long. De mon côté, mes mains souffraient aussi mais nous n’avions pas le choix, il nous fallait rentrer à la maison. Tout en pagayant à un bon rythme, le fait d’être en double nous permettait d’échanger et le sujet du matin fut la gestion du froid ! Presque une question du BAC philo. Le froid, la douleur, la peine sont des informations, à nous d’en faire ce que nous voulons. Si l’on se laisse aller, cette information prendra le dessus sur tout le reste, si on la classe dans la case des «choses secondaires», elle ne pourra plus nous submerger. Au milieu de gros icebergs, je proposais à Karin de visualiser ses mains qui rentraient dans un bain tiède, de percevoir la chaleur lui rendre leurs mouvements, de sentir de nouveau le sang qui afflue dans les extrémités… Au bout de quelques minutes, placébo peut-être, elle n’avait plus froid. Tout ceci n’est qu’un simple exercice de changement de données. Un événement peut vous décupler les forces, comme il peut vous mettre au plus bas. Le travail mental, jusqu’à une certaine limite, peut vraiment faire beaucoup…
Au bout de 4 heures, nous retrouvons avec joie la paix du petit village d’Oqaatsut, les quelques courses que nous avons pu embarquer vont donner un air de fête aux jours suivants. La routine eskimo nous plait bien. Il faut aller chercher de la bonne glace pour le «frigo» et l’eau de table. La douche municipale ferme le week-end et avant 17 heures, ma belle ira se laver les cheveux qui devront sécher au vent polaire. Les 42 villageois nous saluent en silence à notre passage, on sent beaucoup de respect et de complicité, l’exubérance n’a pas de place ici… Le chauffage à pétrole est rallumé, les 4 degrés à l’abri du vent rendent l’atmosphère du soir piquante. Même si la cabane est en chantier, il y fait bon vivre…
A pluche