Baba yaga a mangé le Père Noël…

21 décembre 2011
Boule de neige sur la mascotte, une histoire troll , amis de Baba Yaga !!!

Boule de neige sur la mascotte, une histoire troll , amis de Baba Yaga !!!

Dans les peuples slaves, Baba Yaga (????-???) a une grande place dans les contes et légendes. La vieille sorcière est unijambiste ! Une des histoires dit que le 24 décembre au soir elle fait le tour des maisons pour conseiller les enfants de se tenir tranquille tout au long de la prochaine année. Si quelques téméraires ne tiennent pas promesse, ils seront amenés au fond des bois et dévorés. Tiens, tiens, la mascotte semble se tenir à carreau !

Bientôt le Père Noël va faire le tour du monde avec son traineau, mais je crois que la légende est un poil, de renne, corrompue depuis quelques temps. A la base c’était une fête de la lumière. En effet à partir du 21 décembre les jours cessent de raccourcir et la tradition était de porter sa buche, d’où le gâteau, pour allumer un feu qui honorait la lumière retrouvée. Les occidentaux ont ramené de Turquie la vieille légende d’un homme qui avait trouvé un trésor et qui en voulant faire une surprise à ses enfants avait décidé de passer par la cheminé pour les couvrir d’or. Il se coinça et mourut ! Ses restes sont dans un musée archéologique sur l’île de Rhodes en face Marmaris. St Nicolas, pas le petit mais le barbu, serait donc arrivé au fil des siècles par le Levant, les régions du Nord-est en ont encore gardé la tradition. Les catholiques en ont profité pour y flanquer la naissance de l’enfant Jésus ! D’après d’autres chercheurs, je n’en fais absolument pas parti, la date serait fausse. Je me garderais de soulever la polémique sur l’authenticité de cet homme. (Zut je l’ai écrit !!!).

Puis le Père Noël est apparu, un vieil homme avec une longue barbe, vêtu de vert, qui distribuait des friandises aux enfants malheureux. Dans les années 50 un trust américain vendeur de soda a teinté de rouge ce pauvre vieux pour le rendre comme on le connait aujourd’hui. Les premières réclames étaient nées ! Je vous entends d’ici grincer des dents : mangez un marron glacé ça décrispe ! Donc, cette soirée est celle des enfants, hop à la poubelle les jours qui rallongent. De toute façon, on a la centrale atomique qui fournit à tout va la lumière du soir, donc aucune raison de fêter cela ! La soirée arrive et l’arbre de Noël bio croule sous les ampoules made in China, la pauvre dinde et KO marron ! Et les cadeaux arrivent ! Une manne incroyable pour les grands distributeurs. Le 26 décembre les présents sont remis en vente sur Ebay !!! Ouais ouais, une caricature qui n’en est pas une, hélas ! Pour continuer ma carte postale de Noël made in Cabochard, ce que je trouve malsain en plus de cette débauche d’argent, c’est le mensonge que l’on fait aux tous petits. Pour les plus fortunés le rôle du vieux barbu est tenu par un voisin ou un ami costumé mais l’illusion sera de courte durée. Dans la cour de l’école il va y avoir un plus dégourdi qui va balancer le scoop. Les parents seront embarrassés quand leurs petits chéris les bras chargés diront : « Dis maman pourquoi tu m’as menti, Morgane elle m’a dit qu’il n’existait pas le Père Noël!!! » Je dirais que c’est une certaine manière de les lancer dans la vie des adultes.

Pour cette soirée de Noël il y aura un couple enlacé dans une grande forêt noire et silencieuse. Un feu réchauffera les amants unis, cherchant dans les étoiles celle du Père Noël disparu, il y a bien longtemps. Jo Zef sera de la partie et il a promis de ne plus faire de bêtise car sinon la vieille sorcière unijambiste viendra le kidnapper… D’ailleurs il est convaincu que Baba Yaga va venir manger le Père Noël le soir du réveillon, chut c’est un secret…

Joyeux Noël !

La rivière des insoumis…

14 novembre 2011
Photo Eric Volto

Photo Eric Volto

J’avais affronté les aventures les plus terribles, les éléments avaient fait de ma peau un parchemin, mes yeux avaient déjà rencontré la misère, les hommes m’avaient à maintes fois trahis, plus rien ne semblait m’effrayer mais pourtant j’étais à la veille d’un grand départ qui me terrorisait. Je m’étais mis en tête de descendre la rivière des insoumis…

Mon kayak « Immaqa » était fin prêt et malgré un nuage de tristesse je serrais dans mes bras une dernière fois ma princesse. La rivière minuscule serpentait une forêt dense et noire. Le silence envoutait ce lieu perdu. Je m’étais juré de ne pas pleurer pour mon départ mais des perles suintaient sur mon visage. Le vieux druide des lieux m’avait dressé une sorte de « road book », mais je l’avais pris pour un fou, il était impossible que je puisse rencontrer ce qu’il m’affirmait.

Je prenais la cadence, le ciel anthracite lâchait ses premières hallebardes et le pagayeur pagayait, quoi que de plus normal, non ! Au détour d’une courbe interminable, des rapides me barraient la route, je me calais comme pour partir à la guerre quand soudain des Elfes venaient à ma rencontre. Elles chantaient, elles dansaient, une moins timide, se posa sur ma proue : « Bonjour beau jeune homme, vient sur la berge, arrête ton voyage, tu verras ici tout est facile, plus de souffrance, fini les nuits terribles… ». Je ne pouvais croire en cette apparition puis me revenait en tête le discours du vieux druide, les fées du mal. Elles travaillaient pour un ogre insatiable, qui engloutissait tout être affaibli, il n’avait aucune règle, tout était excuse pour assouvir sa fringale démesurée. C’était le monstre de la surconsommation. La barre d’écume me barrait la route, je pris ma respiration et poussai au plus fort de mes capacités sur les pagaies pour passer les rapides malfaisantes. Les pestes ailées tentaient une dernière approche mais je les chassais d’un coup de rame. Le calme était revenu, je reprenais la veine du courant qui me portait je ne sais où. La tristesse du départ s’atténuait, mais j’avais compris que je n’étais qu’au début d’énormes surprises. Un îlot bien isolé m’accueillit pour y planter mon bivouac, pas de trace suspecte, je pouvais m’y installer. Le feu crépitait et la première étoile me tenait compagnie. Un bruit étrange me refroidissait, des pas, quelqu’un arrivait ! Derrière un massif d’épilobes, je croisais les yeux d’un monstre, la taille et la laideur du grizzli avec un regard démoniaque. Il se dressait sur ses pattes arrières et fonçait sur moi. Un éclair et je me remémorais les propos du vieux : « La peur prendra une forme animale et viendra t’affronter ». Je le fixais et chassais mes émotions, je lui riais au nez et l’invitais à prendre place au festin de saumon qui grillait. Lui tournant le dos je sentais son souffle, l’odeur de la mort. Je m’asseyais en douceur et déposais sur l’ardoise du poisson rose, je me devais de régaler mon hôte, ce n’est pas tous les jours que la peur s’invitait à mon camp. « Je sais que tu es un  monstre mais ta présence me tient compagnie, de toi je vais apprendre et je veux commencer de suite ». Le plantigrade se mit à hurler, à frapper le sol avec violence, la terre semblait se dérober à chaque coup assené. Puis comme par enchantement, il se couchait, se mit en boule pour dormir. J’avais compris qu’il ne me lâcherait jamais mais ne devais surtout jamais lui donner de l’importance.

Au petit matin je reprenais la route, la peur me suivait sur la berge, alors je sifflotais quelques airs d’harmonica. La journée se déroulait sans peine, la rivière des insoumis était belle et sauvage. Un camp de pêche se présentait sur mon bâbord et j’y faisais relâche. On me proposait de me reposer, un hameau paisible où la vie semblait douce et agréable. L’unique ruelle était fleurie et les enfants joyeux m’amenaient à ma demeure. Une étoile accrochée au dessus de la porte d’entrée donnait un côté romantique. Je ne pouvais refuser une telle aubaine, mais soudain la prédiction me revenait, j’allais croiser, l’oisiveté, celle qui tue le rêveur. Je m’accordais une seule nuit et au matin bien avant que le village ne s’éveillait je reprenais ma route. En face l’ours de la peur, m’attendais, je me moquais de lui : « Alors t’as dormi dans la boue ? T’as bien raison de me suivre, au moins je me sens moins seul ! »

Les jours se succédaient avec ses rencontres improbables, le corbeau me saoulait avec ses compliments, je savais que son seul objectif était de me dépouiller de mes guenilles alors je le prenais en dérision. Le castor voulait que je stoppe tout pour construire le plus beau barrage de la région. Plusieurs pièces spacieuses remplies de feuilles de bouleaux pour les longs hivers, un travail de longue haleine qui allait me demander de rester là des années à construire, construire. Tout cela pour avoir toujours le même couché de soleil… Non j’étais un nomade et poursuivais ma route. Le loup m’interpellait : « Suis moi et nous ferons une belle équipe. Ensemble nous serons forts, la biche et l’élan seront à nos repas chaque fois que la faim nous le demandera.» Tuer le faible pour nourrir le fort, non merci ! Immaqa semblait tout entendre et nous foncions vers notre destin…

Un jour de brume là bas au loin je vis enfin l’horizon, l’océan à perte de vue, la fatigue et les rencontres du voyage m’avaient donné encore plus l’envie d’une vie d’errance. La peur m’avait tenue compagnie et les démons m’avaient testé mais la détermination m’avait amené sur cette mer si pure et puissante au doux nom de liberté.

La légende de Nanukilanga…

18 octobre 2011
Danse de l'oie avant de partir à la chasse dans la nation des Yupiks, delta du Yukon, Alaska.

Danse de l'oie avant de partir à la chasse dans la nation des Yupiks, delta du Yukon, Alaska.

Là bas au pays des glaces, Nanukilanga (ours blessé en Inuit) venait de fêter son seizième printemps, son nom venait de sa jambe abîmée et bien des gens du village ne voyaient en lui qu’un enfant diminué. Une jeunesse de révolte. Dans ces terres polaires, c’est à cet âge que l’on doit être initié par le grand esprit de la toundra et des glaces. Les anciens lui avait enseigné avec beaucoup de réticence ce qu’il allait devoir mettre en pratique pendant 7 lunes. Aux yeux de ses proches il ne pouvait s’assumer tout seul, c’était un handicapé !

Le courage est son seul compagnon de route et de la nature, il doit survivre. Le vieux chaman lui transmet un talisman  qui le protégera des kilitoqs, vilains esprits des glaces. Le feu crépite et tout le village c’est réuni pour cette communion d’adieu. Le tambour donne un air très solennel et notre jeune « natif » sait qu’il part pour un long voyage initiatique. Au pays du jour permanent Nanukilanga quitte son clan pour la première fois, le brouillard givre la grande plaine et ses yeux sont embrumés de ce trop plein de liberté. Les jours se succèdent et le doute remplit de plus en plus sa besace. Mais la vie n’a pas était toujours tendre avec lui, alors il chante, il parle aux nuages et doucement rentre en connexion avec le grand créateur. Ses craintes s’estompent, il devient homme à part entière. Le grizzli croise sa route sans l’effrayer pour autant, les loups semblent l’éviter et il réalise que ses craintes n’étaient que les fantômes de son invention. La septième lune dévoile sa face et Nanukilanga en accord avec les éléments se réchauffe auprès d’un grand feu, il a pris une grande décision, il ne rentrera plus au village, il veut parcourir le monde boréale. Au moment de lever le camp, la première étoile apparait, la nuit arrive sur la pointe des pieds. Il comprend que la route choisie va se révéler difficile mais il sait que son choix est le bon. Un cri, un hurlement, il se couche, un monstre va le déchiqueter, il rampe, puis le silence. Un calme lourd et pesant l’envahit, certainement imagination de ses peurs. Il reprend sa route et du fond des cieux une voix douce lui chante : Deviens ce que tu es…

PS: Pour les passionnés des peuples du grand Nord, j’ai volontairement mélangé noms Inuits avec une nouvelle Yupik de mon invention, fantaisie de l’écriture!

Les gens de mer où légendes de vents…

30 janvier 2011

Chut Zeus dort encore, le nomade se faufile sans crainte...

Chut Zeus dort encore, le nomade se faufile sans crainte...

Ulysse avait fait un pacte avec Zeus et Eole, nul ne sût le gage de la transaction, mais une outre lui fût remise. Tous les vents y étaient enfermés, mais personne au monde ne devait en savoir le contenu…

Sur son vaisseau, l’équipage de mercenaires avait remarqué depuis plusieurs lunes une panse de brebis cousue bien pleine. Tel le feu brulant le maquis, la rumeur dévorait les esprits. Quel trésor peut-être caché, des pierres précieuses de Nubie, des encens d’Arménie, de l’huile de roche arabique … Les bouches de Bonifacio se devine dans une nuit étoilée, la convoitise a enfanté un monstre, la dague reflète sur l’astre blanc, elle pénètre sans bruit ce sac de trésor caché, des rires d’enfants trop fatigué de ne pouvoir s’encanailler rugissent. Le souffle portant se transforme en bise fraîche, le ciel s’assombrit, la tempête fait rage, le fils d’Homère se sent bien seul devant l’outre flasque flottant au vent, son équipage vient de le trahir…

Les statistiques sont éloquentes Bonifacio détient le titre de zone la plus ventée de Méditerranée.

La radio  VHF donne le ton à bord du Cabochard : Appel à tous, appel à tous, ici le CROSS MED en Corse qui va diffuser sur le canal 79 un BMS (bulletin de météo spécial)…

La direction du vent est définie par les 4 points cardinaux et sa force est échelonnée de 1 à 12 en force Beaufort qui entre vous et moi nous vexe un peu nous les corses pays des fromages à caractère. Je m’imagine bien la tête des parisiens loueurs de mer, entendre force « brocciu passu », force « caghju merzu », les pauvres là-haut à la capitale le vent a la force « vache qui rit »…

L’humour est le moteur du marin cynique en quête de vent portant. Depuis la modernisation de la navigation on n’entend plus que des vents de Nord-ouest, Sud-est, Nord nord ouest…

Mais où sont passés tous ses noms si parlants, si chantants, si pleurants ?

Tous les peuples vibrant encore avec la Terre ont donné un nom, une âme, une personnalité à chaque type de vent.

La Corse nommée par les grecques « Kallisté » (la plus belle) a encore gardé ce patrimoine si précieux. Quand je suis avec mes amis pêcheurs, je me sens l’apprenti sorcier de Fantasia : « Tu vois le nuage en os de seiche, quand il se forme en dessous du massif de Cagna en regardant la Sardaigne, la Tramontane va arriver avant midi…

Le chapeau là haut sur la pointe la croix de la Trinité, le Maestrale va nous secouer plusieurs jours… »

A mon tour en quelques mots je vais vous dévoiler des noms de légendes.

U Grecale vient de L’Est et n’est qu’éphémère, il va devenir en une nuit « a Tramontana » (Nord-est) dérangeante. Ici dans les bouches on dit qu’il peut rendre fou un homme en une journée de pêche, la mer est trouble et cassante, les vagues sont courtes et fouillis, mais surtout un courant traversier rend le travail difficile.

U Siroccu (Sud-est), c’est un méridional venu des contrées de peuples sous la dictature de quelques visqueux généraux. Comme ses despotes, il est violent, imprévisible, la pluie qu’il amène est rouge, le sang versé par des rêveurs de liberté peut-être. C’est un traitre dévastateur, il ne connaît pas la convention de Genève, en 1968 des milliers de familles ont pleuré des disparus, de la Sicile aux côtes ligures, la baie de Naples en porte encore les stigmates.

U Libeccu (Sud-ouest) le roi des bouches, vent dominant il tord tous les estivaux en quête de récits marins, Nous le connaissons bien c’est un membre de la famille, sa houle longue est familière, un lève tard, jusqu’à midi il soupire d’une après-midi musclée, il va se régaler à faire vomir les « pumataghji » (expression corse qui définit les touristes « neufs » blancs le matin  se retrouvant le soir, rouges comme des pumati (tomates) »

U Punente (Ouest) un bisexuel, entre la féminité du sud et la masculinité du nord il est éphémère et choisira vite fait le camp des hommes du nord.

U Maestrale (Nord-ouest), c’est l’intellectuel de la rose des vents, il ne vient qu’accompagné de la règle de 3. Les savants de la météo auront leur théorie, nous pauvres habitants de la mer nous savons qu’il vient pour 3, 6, 9 voir 12 jours l’hiver. Les amarres sont rêches, le pont est craquant et froid. La houle semble venir de l’autre bout du monde tellement elle est longue et dure. Il est loyal, on sait qu’il ne tournera pas sa veste et on peut travailler avec lui.

Puis les deux romantiques, ils bercent les enfants en apprentissage du métier noble de la mer. U Montese et U Marinu. Dans la période estivale il y a  2, voire 3 semaines avec un  gros anticyclone calé sur le mare nostrum, les brises rafraîchissent les paillotes où l’on recoud les trémailles, où l’on appâte les palangres, où l’on prépare « l’Aziminu » (Bouillabaisse où en plus des poissons de roches classiques on y rajoute : langouste, cigale, poulpe, calamar, st Pierre, Denti. Ne cherchez pas ce met dans les restaurants il n’existe que dans les familles pour des grands événements. Les stagiaires Bout de vie 2009 ont eu ce privilège).

Donc, ces deux amis se partagent la journée, u Montese descend des vallées le matin et les anciens qui travaillaient à la voile latine savaient l’apprécier, vers midi il part à la sieste et U Marinu vent du large prend la relève ramenant les felouques ajacciennes pour troquer la pêche du jour.

Mes voyages au bout du monde m’ont fait rencontrer des nomades du vent et de la terre et ils m’ont présenté:

Le Piteraq,  violent, il balaie l’Inlandsis du Groenland

Le Sharav,  dans son souffle sec il sable le désert  Negev en Israël

Le Williwaw, des immenses glaciers, il lâche ses airs cabatiques sur le détroit de Magellan en Patagonie

L’Unghalak , briseur de nomade en kayak, le Nord-ouest dans le grand Nord canadien

Le Canterbury Northwester, vent de Nord-ouest de Nouvelle-Zélande, il tourne à l’envers de ses cousins de l’hémisphère nord, la force de Coriolis inversée sans doute…

A partir d’aujourd’hui quand vous sentirez une brise sur votre visage, humez là, si elle est froide, humide, tiède, sèche elle vous dira d’où elle vient et vous racontera de belles légendes.

Jo Zef rajoute que quand sa pile de crêpes commence à s’envoler, il est temps de rentrer au mouillage !