Baignade à Tartunaq

11 août 2019
 

 

Pas un bruit, pas une ride sur l’eau, l’océan Arctique est vraiment généreux avec nous. A une encablure de notre mouillage, une immense plage de sable gris. En toute confiance deux renardeaux polaires tentent de dépouiller une carcasse de phoque. Un simple rappel pour nous, les passagers de la Louise, qu’ici l’existence n’est que survie. Devant nos bols de céréales, nous débattons sur le programme de la journée. Le plan est conclu,nous descendrons à terre pour aller explorer ce bout du monde. Mais l’équipe est prête à bien plus qu’une simple randonnée, ils ont la volonté de tenter une nage polaire en simple maillot de bain. Les premières à avoir décidé de cette expérience , sont Lara et Elia, les autres par dépit ou provocation suivront le mouvement. Ils doivent tout prévoir, je serai juste là pour leur sécurité. Christian, que j’aime appeler le capitaine du drakkar est le mécène de cette aventure et bien sûr il fait partie de l’équipage.
Je vois souvent dans ses yeux beaucoup d’admiration pour ses jeunes prêts à en découdre avec leur nouvelle vie. Souvent les « autres » les définissent de
courageux, vous ne pouvez pas savoir comme cela les agacent, les irritent. Ils ne sentent pas courageux mais juste vivants. Avant d’embarquer sur l’annexe pour rejoindre la terre ferme,  j’emporte un seau et une écope, cela sera le petit plus pour la sortie du bain. Là-bas au bout de la plage un cours d’eau se jette dans 9l’océan, de l’eau douce pour se dessaler. Dédé le second retourne à bord, le silence nous saisi, l’immensité nous donne le frisson, nous ne sommes rien. En silence,nous suivons les striures causées par la marée. En abondance des traces de renards et de rennes pas un seul pas d’homme. Nous y voilà, le cours d’eau délimite la zone de baignade. Lara la première se déshabille, elle sourit mais nous la sentons concentrée. Sans ciller, sans trembler, elle marche au ralenti dans l’eau, soudain elle stoppe sa marche et s’immerge dans une eau à 4 petits degrés.
Pas un rictus, elle sourit, ca y est elle réalise son rêve. Elle nage, elle ne
veut plus sortir de l’eau, elle comprend des choses. La douleur, le froid ne sont que des informations à nous de ne pas leur donner trop d’importance. Le corps en fusion elle sort de l’eau, le seau est rempli d’eau douce un peu plus chaude que l’océan, elle se dessale pour laisser la place aux autres. Puis ce sera à Elia,qui toute seule découvrira la baignade en eau froide puis Bastien, Jean-Luc et Maxence. Christian et Louane ne sont pas prêts, ce sera peut-être pour une prochaine fois. Tous les nageurs sont ravis, émus de ce moment de grâce. Mais un défi en appelle un autre, un sommet semble narguer le groupe, ils partent à son assaut. De la plage je regarde le groupe, la pente est raide, compliquée d’accès,que le Diable se tienne tranquille mes vaillants chevaliers lui couperont la queue en atteignant fièrement le sommet. En attendant leur retour, Elia et Louane m’aident à bâtir un foyer de fortune et récolter des branches mortes de camarines, nous allons faire cuire des moules sur une pierre plate…
Nous reprenons la mer pour nous rapprocher de la calotte polaire, la mer se
charge de glace, la température chute, l’aventure continue.
Takuss